La brûlure de la main : Etude de 122 cas à la phase aigue
MD Elamrani, A Bhihi #, M Quaboul, I Yafi, M Mahrouch, M Sahibi, Y Benchamkha
Service de chirurgie plastique, réparatrice, esthétique et brûlés, CHU Mohammed VI, Marrakech, Maroc
# : auteur correspondant
DOI
//dx.doi.org/10.13070/rs.fr.6.2801
Date
2019-08-31
Citer comme
Research fr 2019;6:2801
Licence
Résumé

Introduction : Les brûlures de la main sont très fréquentes et d’étiologies variées, pouvant être isolées ou associées à des brûlures plus étendues. Elles sont fonctionnellement graves perturbant l’autonomie du patient, d’où la nécessité d’une prise en charge initiale bien conduite, médico-chirurgicale et rééducative. Le but de cette étude était d’analyser les caractéristiques épidémiologiques, cliniques et thérapeutiques des mains brûlées. Patients et méthodes : Une étude rétrospective a été réalisé au service de chirurgie plastique et des brûlés au centre hospitalier universitaire Mohammed VI de Marrakech, s’étendant de janvier 2013 à décembre 2017. Cette étude a permis de colliger 122 cas, incluant les patients ayant des brûlures au niveau d’au moins une main et consultant durant la phase aigue de la brûlure. Résultats : Les adultes jeunes (42%) et les enfants âgés de moins de six ans (33%) étaient les plus touchés. La face dorsale était la plus atteinte chez l’adulte par flamme de butane. La face palmaire chez les enfants était la plus touchée par contact. La prise en charge de la phase aigue a été adaptée à chaque cas en fonction de l’étendue de la brûlure et de sa profondeur. Elle a fait appel à une cicatrisation dirigée avec ou sans greffe cutanée ultérieure chez la majorité des cas, une excision-greffe précoce avec utilisation du derme artificiel chez un patient et des amputations dans 7 cas. Tous nos patients ont bénéficié de kinésithérapie. L’évolution a été marquée par un résultat satisfaisant pour la plupart des patients traités. Conclusion : La prise en charge des brûlures de la main est lourde et multidisciplinaire qui doit se faire dans une unité de brûlés. La prévention reste l’objectif prioritaire.

English Abstract

Introduction: Burns of the hand are very common and of various etiologies, which can be isolated or associated with more extensive burns. They can seriously affect the function of the hand and disrupting the patient's autonomy. Therefore, adequate initial medical, surgical and rehabilitative management is essential. The aim of this study was to analyze the epidemiological, clinical and therapeutic characteristics of burned hands. Patients and methods: A retrospective study was performed in the department of plastic surgery and burns at the Mohammed VI university hospital in Marrakech, from January 2013 to December 2017. We collected 122 cases including patients with burns in at least one hand, who consulted during the acute phase of burns or during the phase of sequelae. Results: Young adults (42%) and children aged less than 6 years (33%) were the most affected. The dorsal surface of the hand was the most affected in adults by butane flames. The palmar face was the most affected in the child by contact. The treatment in the acute phase was adapted to each case according to the extent of the burn and its depth. It consisted of a controlled wound healing with or without delayed skin graft in the majority of cases, early excision and grafting with application of artificial dermis in one case, and amputations in 7 cases. All our patients benefited from physiotherapy. Results were satisfying for most treated patients. Conclusion: The management of burned hands is heavy and multidisciplinary. It should be done in a burn unit. Prevention remains a priority objective.

Introduction

La main est le prolongement du cerveau et l’interface avec le monde qui nous entoure. Elle ne représente que 2,5 % de la surface corporelle mais son rôle social, esthétique, relationnel et professionnel est majeur. Les brûlures de la main sont fréquentes, il s’agit d’une zone très exposée du fait de la réaction de défense devant toute agression par un agent vulnérant [1]. Les brûlures de la main n’engagent pas le pronostic vital, mais elles sont souvent graves du fait de leur potentiel séquellaire, esthétique et fonctionnel. Elles nécessitent une prise en charge spécialisée, dès la phase aiguë, idéalement dans un centre de brûlés, afin d’obtenir une cicatrisation avec un minimum de séquelles.

Tableau 1. Données de nos patients.
Sexe Age Lieu de l’accident
HFEnfantAdulteDomicileAutres
675554689329

Le but de ce travail est de relever les données épidémiologiques, cliniques, thérapeutiques et évolutives des brûlures de la main à la phase aigue au service de chirurgie plastique, réparatrice, esthétique et brûlés du CHU Mohammed VI de Marrakech et de faire une revue de la littérature traitant les brûlures de la main afin d’en tirer les principales recommandations, permettant de mettre en place un arbre décisionnel de prise en charge spécifique de cette localisation particulière de brûlures.

Tableau 2. Répartition selon l’agent causal.
Mécanisme de brulure Nombre Pourcentage %
ThermiqueFlammeFlamme de butane5141,8%
Autres : Essence, diluant, bougie, incendie,…)1814,75%
ContactLiquide chaud (Eau, thé, huile…)2621,31%
Solide chaud (Braise, plastique, barbecue…)1411,47%
Electrique Electrique vraie8 9,8%
Flash électrique4
Chimique Acide chlorhydrique10,8%
Patients et méthodes

Afin de décrire le profil épidémio-clinique et thérapeutique des mains brûlées au service de chirurgie plastique, réparatrice, esthétique et brûlés du CHU Mohammed VI de Marrakech, nous avons réalisé une étude rétrospective étalée sur 5 ans, de janvier 2013 à décembre 2017. Durant cette période, nous avons colligé 122 patients qui nous ont été adressés pour prise en charge de brûlures durant la phase aigue et chez qui au moins une main est atteinte. Nous avons inclus dans l’étude les patients de tout âge et qui présente une brûlure d’au moins une main. Ils ont été exclus de cette catégorie les grands brûlés décédés les premiers jours après leur admission et les patients avec dossier incomplet. Chez chaque patient, nous avons retenu plusieurs critères recueillis à partir de l’exploitation des dossiers du service et des registres des interventions du bloc. Une fiche d’exploitation préétablie a été élaborée dans ce but englobant des données épidémiologiques, cliniques et thérapeutiques. La saisie, l’analyse des données, les tableaux des résultats ainsi que les graphiques ont été élaborés sur Excel puis transférés sur Word pour la confection du document final. Le respect de l’anonymat ainsi que la confidentialité ont été pris en considération lors de la collecte des données.

Tableau 3. Antécédents pathologiques des patients.
Antécédents Nombre de cas
Trouble psychiatrique13
Epilepsie10
HTA5
Diabète3
Cardiopathie2
Cécité bilatérale1
Hypothyroidie1
Résultats

Nous avons noté que 47% des cas hospitalisés pour des brûlures (Toutes brûlures confondues), présentaient des brûlures d’au moins une main. L’âge moyen de nos patients au moment de l’accident était de 21,3 ans. Les adultes jeunes entre 18 et 40 ans étaient les plus touchés (42%), suivi des enfants de moins de 6 ans (33%) (Figure 1). Une légère prédominance masculine a été notée avec un sex-ratio de 1,2. L’origine thermique était incriminée dans 90% des cas. L’atteinte par flamme de butane à elle seule représentait 42% des cas. Parmi les 40 cas ayant moins de 6 ans, 30 cas (75%) ont été brûlés par contact avec un liquide bouillant ou un objet solide chaud. Nous avons observé 12 cas de brûlure électrique et un seul cas de brûlure chimique (Tableaux I-III) (Figure 2).

La brûlure de la main : Etude de 122 cas à la phase aigue Figure 1
Figure 1. Répartition des patients selon l’âge au moment de l’accident.

La brûlure était due à un accident domestique dans 76% des cas (Figure 3). Sur les 122 patients pris en charge initialement dans notre structure, 13% présentaient des brûlures isolées de la main, 46 % présentaient un syndrome face-main et 41% étaient de grands brûlés dont 5 cas avaient un autre traumatisme associé.

La brûlure de la main : Etude de 122 cas à la phase aigue Figure 2
Figure 2. Types de brûlures. a- Brûlure par flamme. b- Brûlure par flash éléctrique. c- Brûlure éléctrique par courant à haut voltage. d- Brûlure chimique par acide chlorhydrique. 

La surface corporelle brûlée (SCB) moyenne était de 21,16%. Chez les enfants de moins de 6 ans, la face palmaire était atteinte dans plus de 92% des mains brûlées, contre 30% pour la face dorsale. Chez les adultes et les enfants âgés de plus de 6 ans, la brûlure a touché plus fréquemment la face dorsale, avec respectivement 94,5% et 68,2% (Figure 4).

La brûlure de la main : Etude de 122 cas à la phase aigue Figure 3
Figure 3. Répartition selon les circonstances de la brûlure.

Après les mesures de réanimation, la prise en charge des mains brûlées à la phase aigue consistait initialement à l’ablation des objets faisant effet garrot (Bague, bracelet…), suivie d’une mise à plat des phlyctènes, un nettoyage, une détersion puis un rinçage avec du sérum physiologique. La réalisation du premier pansement faisait appel à l’application d’un topique anti-infectieux, à base de sulfadiazine argentique (Flammazine®), ce pansement était épais, occlusif, avec des doigts bien individualisés, commissures écartées posturant la main en position intrinsèque positive. Les incisions de décharge ont été réalisées dans 26,4% des mains brûlées. L’aponévrotomie a été réalisée chez 3 patients victimes d’une brûlure électrique suite à un syndrome de loge important, 7 patients ont subi une amputation.

La brûlure de la main : Etude de 122 cas à la phase aigue Figure 4
Figure 4. Répartition selon l’âge zone-brûlés.

Concernant la couverture des zones brûlées, un seul patient a bénéficié d’une excision-greffe précoce à J3 post brûlure. Le patient a bénéficié d’une excision des tissus nécrosés suivi d’une greffe du derme artificiel (Intégra®) sur la région dorsale des deux mains et d’une greffe de peau mince sur les doigts (Figure 5).

La brûlure de la main : Etude de 122 cas à la phase aigue Figure 5
Figure 5. Brûlure 3ème degré par flamme de butane des 2 mains : a- Incisions de décharge à j1 post-brûlure. b- Excision des tissus brûlés à j3 post-brûlure. c- Fixation du derme artificiel (Integra®). d- Greffe de peau semi épaisse au niveau de la face dorsale des 02 mains après enlèvement de la couche de silicone et mise en place de membrane amniotique au niveau des phalanges pour stimuler le bourgeon à j24 post brûlure. e- Résultat après cicatrisation des zones greffées par (Integra®).

A l’exception des 7 patients amputés et le patient qui a bénéficié d’une excision- greffe précoce, toutes les mains brûlées ont été menées en cicatrisation dirigée. Les patients bénéficiaient alors de pansements quotidiens et d’une kinésithérapie adaptée. L’évolution des brûlures a été réévaluée régulièrement par un médecin. La cicatrisation dirigée a permis d’obtenir une cicatrisation spontanée chez 89 patients (78%), 25 cas (22%) ont nécessité une greffe de peau mince ou semi épaisse après 3 semaines d’évolution de la brûlure, en raison d’absence d’épithélialisation et l’impossibilité d’obtenir une cicatrisation spontanée (Figure 6).

La brûlure de la main : Etude de 122 cas à la phase aigue Figure 6
Figure 6. Brûlure par flamme de butane de 2ème degré profond circulaire, des incisions de décharge ont été réalisées à l’admission puis suivi en cicatrisation dirigée : a- Absence d’épidermisation spontanée à j21 post brûlure. b- Curetage du bourgeon. c- Greffe de peau mince en regard des pertes de substance. d- Résultat à 4 mois post-opératoire.

La rééducation a accompagné toutes les phases du traitement chez nos malades. Les mobilisations passives, actives aidées et actives ont été pratiquées chez nos patients par l’équipe de kinésithérapie, elles consistaient en : flexion-extension du poignet, inclinaisons latérales, flexion-extension des MP, flexion-extension des doigts s'il n'y a pas de risque articulaire, ouverture de la première commissure, opposition du pouce et 5ème doigt.

La brûlure de la main : Etude de 122 cas à la phase aigue Figure 7
Figure 7. Suivi post-opératoie. a- Séance de kinésithérapie. b- Attelle de maintien anti-rétraction entre les séances en position intrinsèque positive. c- Attelle de maintien en capacité cutanée maximale pour une main greffée.

Des postures manuelles entre les séances ont été appliquées en fonction des localisations des lésions. Dans les brûlures de la face dorsale de la main, nous avons utilisé des attelles palmaires statiques avec poignet en légère extension, MP en flexion à 80', interphalangiennes des doigts longs en extension, premier espace interosseux en ouverture maximale et pouce en légère opposition. Dans les brûlures de la face palmaire on avait recours à des attelles palmaires statiques avec hyperextension plus importante du poignet, extension des métacarpophalangiennes, extension des interphalangiennes et abduction du 1er et du 5ème doigt. En cas de brûlures des deux faces, les deux attelles ont été alternées (Figure 7).

La brûlure de la main : Etude de 122 cas à la phase aigue Figure 8
Figure 8. Logigramme de prise en charge des brûlures de la main.

Lors du suivi, un nombre considérable de nos patients ont été perdu de vue. Parmi les patients suivis régulièrement, les résultats fonctionnels ont été jugés bons dans 49 % des cas, moyen dans 18% des cas et mauvais dans 9,8% des cas.

Discussion

La brûlure est un accident qui reste toujours très fréquent au Maroc et surtout dans les milieux ruraux. Elle représente 2% des patients admis aux urgences toutes pathologies confondues [2]. Environ 1,2% des urgences globales du CHU Mohammed VI étaient des brûlures [3]. Dans notre série d’étude, nous avons noté que 47% des cas hospitalisés pour des brûlures (Toutes brûlures confondues), présentaient des brûlures d’au moins une main.

En effet, les brûlures de la main sont présentes chez 50 % des patients hospitalisés dans les centres de brûlés, elles sont présentes une fois sur cinq chez les enfants brûlés. Dans notre série d’étude, les brûlures touchaient principalement une population jeune, le moyen d’âge au moment de l’accident est de 21,3 ans. La tranche d’âge comprise entre 18 et 40 ans représente 42% et les enfants de moins de 6 ans représentent un tiers des cas soit 33%. Les patients âgés de plus de 40 ans ne représentent que 14%. En effet, plus encore que dans les pays développés, les enfants dans les pays pauvres sont les victimes « privilégiées » des brûlures. Ils représentent environ un tiers de tous les brûlés avec une fréquence particulièrement élevée entre 0 et 4 ans, tranche d’âge qui correspond à 50 % de toutes les brûlures des enfants [4, 5].

Dans notre étude, tout âge confondu, on note une légère prédominance masculine (54,6%). Le sex-ratio en faveur des hommes est retrouvé dans les différentes séries des mains brûlées en phase primaire ou séquellaire [6, 7].

Dans notre série, 62,5 % sont de bas niveau socio-économique. Outre l’incidence nettement supérieure des brûlures selon l’OMS dans les pays en voie de développement, il existe également des différences selon la situation socio- économique à l’intérieur du même pays [8, 9].

Les brûlures surviennent chez des sujets à risque, en effet les antécédents des patients constituent à la fois un facteur prédisposant et pronostique de l’évolution de la brûlure [10]. Dans notre série, nous avons observé 13 cas de troubles psychiques et 10 cas d’épilepsies.

L’accident s’était produit principalement à domicile dans 76% des cas, un résultat proche est retrouvé par Kibadi et al [7]. Des séries sur les brûlures de la main chez la population pédiatrique trouvent que les brûlures domestiques représentent plus de 90% des cas [6]. Chez nos patients, l’origine thermique était incriminée dans 94% des cas. L’atteinte par flamme est retrouvée dans 59% des cas. La brûlure par flamme de butane à elle seule représentait 42% des cas. La brûlure par flamme a concerné surtout les adultes. En effet, les atteintes sont liées à la flamme de butane contenu dans « la petite bouteille de 3 kg».

Parmi les 64 cas ayant moins de 6 ans, 48 cas (75%) ont été brulés par contact avec un liquide bouillant ou un objet solide chaud. Dans cette tranche d’âge, la flamme n’était responsable que de 16% des brûlures. Les mains sont une localisation privilégiée pour les brûlures électriques. Il s’agit le plus souvent d’accidents domestiques (10 cas) mais aussi d’accidents de travail (2 cas). Les brûlures électriques sont responsables des lésions les plus graves, elles sont plus fréquentes au niveau des mains que toute autre localisation [11].

Nous avons observé 1 cas de brûlure chimique par acide chlorhydrique dans le cadre d’une agression. La gravité de la brûlure est étroitement liée à la nature du produit chimique. Le refroidissement sur le lieu de l’accident est primordial.

Les brûlures des mains peuvent être bilatérales rendant leur prise en charge encore plus délicate. Dans notre série cela représente un pourcentage de 64,7%. Pour nos patients (Tout âge confondu), la face dorsale était la zone la plus touchée par la brûlure (84% des mains brulées), suivie de la face palmaire (45% des mains brulées). Chez les enfants de moins de 6 ans, la face palmaire était atteinte dans plus de 92% des mains brulées, contre 30% pour la face dorsale. Chez les adultes et les enfants âgés de plus de 6 ans, la brûlure a touché plus fréquemment la face dorsale, avec respectivement un pourcentage de 94,5% et 68,2%. Ces résultats sont en accord avec les constats de la littérature. Tous les auteurs trouvent que les zones les plus touchées sont la face palmaire chez l’enfant et la face dorsale chez l’adulte [6].

L’atteinte circulaire (26.4% de nos patients) est un critère de gravité en cas de brûlure profonde. Elle pourra provoquer des ischémies distales et en particulier digitales. Elles nécessiteront alors la réalisation d’incisions de décharge.

La SCB moyenne de notre série était de 21,16%. Les autres séries rapportent des moyennes différentes [12]. Cette moyenne élevée de la SCB peut être expliquée par le mécanisme de la brûlure retrouvé chez nos patients, un grand nombre était victime d’une brûlure par flamme de butane ou ébouillantement dans le bain maure ce qui donne des brûlures souvent étendues.

Parmi les lésions associées aux brûlures de la main, les brûlures du visage arrivent en première position (46% des cas) réalisant le classique syndrome face-main. Cette association peut être expliquée dans notre contexte par les explosions de petite bouteille à gaz de 3kg ou des projections de liquide chaud, Il correspond au réflexe de protection du visage et des yeux.

Seul 13% de nos patients ont été admis pour des brûlures isolées de la main, ce qui diffère fortement de la série de Kang-an wang et al (28,84%) [12]. Les brûlures isolées de la main constituent le cas idéal où toutes les possibilités thérapeutiques sont offertes pour sauver le membre et sa fonction. La faible incidence dans notre étude peut être expliquée par le fait que la grande majorité des patients ayant des brûlures très peu étendues sont gérés en ambulatoire et ne consultent dans un centre spécialisé qu’en phase de séquelles.

Tout traumatisme associé à une brûlure grave caractérise le brulé polytraumatisé [13]. Parmi les patients de notre étude 5 ont un traumatisme orthopédique ou viscéral associé.

L’opposition entre excision-greffe précoce et méthode traditionnelle a été la source de nombreuses publications mettant en évidence des résultats contradictoires. De nombreux auteurs, ayant réalisé des études comparatives (Entre traitement précoce et retardé), mettent en évidence des résultats fonctionnels tardifs en faveur du traitement précoce [14, 15]. A l’opposé, des études comparant ces deux techniques n’ont trouvé aucune différence significative dans la prise en charge des brûlures de la face dorsale des mains second degré intermédiaire et profond [16, 17].

Dans notre étude, un seul patient a bénéficié d’excision-greffe précoce à j3 post brûlure.

La difficulté à évaluer la profondeur d’une brûlure lors de sa prise en charge initiale, l’association à d’autres lésions graves et une surface corporelle brûlée importante, ainsi que le problème du tableau technique nous poussent à privilégier le traitement conventionnel. Les patients donc font l’objet d’une surveillance stricte et d’une kinésithérapie adaptée en attendant une greffe de peau différée si la cicatrisation n’est pas obtenue après 21 jours.

Des amputations peuvent être nécessaires dans les cas de mains très graves avec un devenir fonctionnel peu prévisible. Sept patients de notre série ont subi des amputations.

A la lumière des résultats obtenus de notre étude et la revue de la littérature nous proposons l’arbre décisionnel suivant pour la prise en charge des mains brûlés (Figure 8).

Conclusion

La main est fréquemment touchée par les brûlures. Ainsi, près de 50% des brûlés hospitalisés présentent des brûlures de la main. Elles sont principalement thermiques, survenant à domicile et touchant préférentiellement les hommes. La gravité des brûlures de la main est liée aux séquelles qu’engendre le traumatisme. La prise en charge primaire des brûlures de la main détermine en grande partie la qualité du résultat global. En dehors des brûlures intermédiaires de petite surface pouvant être gérées en ambulatoire, le traitement initial des brûlures de la main doit être réalisé dans une unité de brûlés. Pour les brûlures intermédiaires, nous optons pour un traitement par cicatrisation dirigée. Toutes les zones évoluant défavorablement et n’aboutissant pas à une cicatrisation spontanée en 21 jours doivent être greffées. Les brûlures plus profondes, doivent bénéficier d’une excision greffe-précoce. Au cours de la phase de cicatrisation, une attention toute particulière doit être portée sur la mobilisation et l’immobilisation des mains brûlées. La place de la kinésithérapie est incontestable. La prévention est l’arme de choix, elle passe par les différentes compagnies de sensibilisation aux règles de sécurité pour prévenir les accidents domestiques et les accidents de travail. Elle passe également par une prise en charge précoce et efficace des brûlés à la phase aigue en cas d’accident, avec un suivi régulier à long terme pour dépister, au plus tôt, des anomalies morphologiques importantes pouvant altérer le pronostic fonctionnel de la main.

Déclaration
Conflits d’intérêts

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts.

Contribution des auteurs

Tous les auteurs ont contribué à la réalisation de ce travail et ont lu et approuvé la version finale du manuscrit.

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